Retour au grand jour à Goma : Kabila s’assume ( Tribune de Evo Jacob Tshimanga)

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Le retour de Joseph Kabila en RDC, via Kigali, en a surpris plus d’un. Un passage par le Rwanda, officiellement considéré par l’État congolais comme un pays agresseur, ne saurait être anodin. Pourquoi donc l’ancien président de la République démocratique du Congo a-t-il choisi cette voie pour réapparaître publiquement à Goma ? Pourquoi pas Kinshasa, la capitale, symbole de l’autorité institutionnelle ? Autant de questions qui agitent l’opinion nationale.

En vérité, cette rentrée soulève bien des interrogations. Elle inquiète, dérange, interpelle. Elle charrie les lourdeurs d’un passé non résolu, d’un présent troublé et d’un avenir incertain.

Passer par Kigali, c’est envoyer un message. Un message silencieux, mais puissant. Le Rwanda — dont les liens avec les groupes armés opérant à l’Est ne sont plus à démontrer — devient le sas d’entrée de celui que certains, au sein même de sa famille politique, qualifient déjà d’exilé. Mais est-il réellement en exil ou plutôt en pleine manœuvre stratégique ? Ce détour n’est-il pas une manière subtile de se repositionner, loin du centre, mais au plus près de ses anciennes bases ?

À Goma, il semble « chez lui ». Un terrain familier. Une région où son influence demeure palpable. Et pendant qu’il y établit ses quartiers, à Kinshasa, l’agitation gagne les cercles du pouvoir. Le président Félix-Antoine Tshisekedi abrège brusquement son séjour à Lubumbashi pour regagner la capitale. Pourquoi ce retour précipité ? Que se trame-t-il en coulisses ?

La suspicion enfle. Et comme le dit si bien l’adage : il n’y a pas de fumée sans feu. Pourquoi est-ce toujours Kabila qu’on soupçonne ? Parce que son silence est lourd, son ombre omniprésente, son héritage encore incandescent. Il revient au moment même où l’on évoque des perquisitions visant ses biens, des pressions sur son entourage, voire la saisie de propriétés appartenant à son épouse. S’agit-il d’un retour de revanche ? Ou d’une simple réaffirmation de son rôle dans l’échiquier politique congolais ?

Et pourquoi Goma, à quelques encablures du chaos ? Pour officialiser certaines idées jusque-là murmurées ? Le fédéralisme, évoqué par Olivier Kamitatu — proche du camp Katumbi —, serait-il en train d’être testé sur le terrain ? Mais si fédéralisme il doit y avoir, ce ne peut être que par voie référendaire, dans le respect strict des formes constitutionnelles. Tout autre chemin serait une épreuve de force, dangereuse pour l’unité nationale.

Plus troublant encore : des prélats catholiques sont eux aussi récemment passés par Kigali pour atteindre Goma. Le Rwanda serait-il devenu un passage obligé pour accéder à l’Est de notre pays ? Si Kabila et les hommes de Dieu empruntent le même couloir, que faut-il en conclure ? Que la souveraineté nationale s’effrite précisément là où elle devrait se montrer la plus ferme ?

Joseph Kabila s’assume. Il revient, non par la grande porte institutionnelle de Kinshasa, mais par un itinéraire symbolique, controversé, et lourd de sens. Est-ce un signal de confrontation ou de résilience ? Un appel à l’affrontement ou à la réaffirmation de son existence politique ?

L’histoire nous dira s’il revient en homme d’État ou en chef d’un contre-pouvoir. Mais une chose est certaine : la République entre dans une phase de tension politique qu’il faudra gérer avec lucidité, intelligence et sang-froid.

Evo Jacob Tshimanga

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