La condamnation à mort des jeunes bandits urbains Kinois suscite des débats intenses dans tous les parloirs de Kinshasa. Alors que certains soutiennent la décision du ministre de la justice, d’autres s’y opposent vigoureusement, arguant d’une possible violation des principes juridiques. Pour ces derniers, cette condamnation risque d’attiser l’insécurité déjà présente dans la capitale.
Parmi les réactions, celle du député provincial Junior Nembalemba se distingue par son analyse approfondie de cette question controversée. Selon lui, le banditisme urbain, connu sous le nom de « Kuluna », est le résultat d’un système défaillant où l’État partage une responsabilité significative. Il souligne que ces jeunes délinquants sont souvent des victimes d’un manque d’éducation, d’encadrement, d’opportunités d’emploi et de soutien de la part de la société.
Nembalemba reconnaît la gravité des actes commis par ces délinquants, mais soulève la responsabilité de l’État dans la situation, appelant à une réflexion approfondie sur les causes profondes du phénomène. Il insiste sur la nécessité de prévenir ces dérives en investissant dans l’éducation, l’encadrement et la réinsertion sociale des jeunes, plutôt que de se limiter à des mesures répressives telles que la condamnation à mort.
« ce fléau, qui ne date pas d’aujourd’hui, est le fruit de générations sacrifiées par manque d’éducation, d’encadrement, d’opportunités d’emploi et de choix. Il s’agit des jeunes laissés-pour-compte, abandonnés à leur sort dans une société qui a failli à leur offrir des perspectives. Certes, les atrocités et les meurtres commis par ces jeunes délinquants sont inacceptables et doivent être condamnés, mais il estime également que la véritable question à se poser est la suivante : où est la responsabilité de l’État dans cette dérive ?Est-il juste de condamner à mort ces jeunes sans traiter les causes profondes qui les ont menés à de tels extrêmes ?. L’histoire nous enseigne que des opérations comme Mbata, Likofi I et II, bien qu’énergiques, n’ont eu que des effets temporaires, car elles se limitaient à une répression agressive sans prévention durable et les résultats étaient une recrudescence de ce phénomène. Aujourd’hui, la légère diminution du banditisme n’est qu’un effet placebo. Tant que l’État ne s’attaquera pas à la racine du problème en investissant dans l’éducation, l’encadrement et la réinsertion sociale, ce fléau persistera. J’invite donc la ministre de la Jeunesse à réfléchir sérieusement à ce problème et à proposer des solutions concrètes et adaptées au gouvernement. Il ne s’agit pas seulement de condamner ces jeunes, mais de prévenir ces dérives pour leur offrir un avenir meilleur. Car nous avons tous droit à un meilleur avenir », a-t-il écrit sur son compte X.
De son côté, le juriste Jackson Junior critique la décision d’imposer la peine de mort aux Kuluna. Selon lui, le banditisme urbain n’est pas une infraction prévue par la législation congolaise, et la peine de mort ne peut être appliquée que dans des cas exceptionnels impliquant des atteintes graves à la vie ou à la sûreté de l’État.
Il remet en question la procédure judiciaire entourant cette condamnation et souligne l’importance du respect des droits de la défense, notamment en ce qui concerne les voies de recours. Il critique également la légèreté avec laquelle cette lutte contre le banditisme est menée, soulignant le rôle émotionnel plutôt que rationnel dans le processus de jugement.
S’appuyant particulièrement sur le cas du jeune fanfariste de l’église Armée du Salut qui aurait été arrêté par erreur, Me Jackson déclare que “Le ministre dit que le sieur a été condamné dans le cadre du procès relatif à la lutte contre le banditisme urbain, au lieu de nous dire pourquoi il a été condamné et ce qui lui a été reproché par l’organe de la loi.
Poursuivant, il ajoute que “s’il (le jeune musicien de l’armée du salut) a fait appel, ce que le délai de recours courrait encore. Qui dit délai d’appel, dit sursis de l’exécution de la peine. La peine de mort ne peut être exécutée qu’après l’écoulement de toutes les voies de recours voire leurs délais ?”
Pour finir, il a fermement condamné “ la légèreté avec laquelle cette lutte est menée…” et a souligné que les juges statuent non sur base de la raison, mais sur celle des émotions.
Fidel Songo