Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé mardi un cessez-le-feu avec le Hezbollah au Liban à l’issue d’un cabinet de sécurité. L’accord devrait entrer en vigueur dès mercredi.
C’est désormais chose faite. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a confirmé, mardi 26 novembre, à l’issue du cabinet de sécurité israélien, qu’un accord de cessez-le-feu avait été trouvé avec le Hezbollah au Liban.
« Nous ferons respecter l’accord et répondrons avec force à toute violation. Ensemble, nous continuerons jusqu’à la victoire », a-t-il déclaré lors d’une allocution télévisée. « En totale coordination avec les États-Unis, nous conservons une totale liberté d’action militaire. Si le Hezbollah viole l’accord ou tente de se réarmer, nous frapperons de manière décisive« .
Cet accord doit être présenté à l’ensemble de son gouvernement dans la soirée mais les regards se tournent désormais vers les États-Unis et la France. Les présidents Joe Biden et Emmanuel Macron doivent confirmer officiellement dès 21 h (heure de Paris) la trêve qui pourrait débuter mercredi 27 novembre dès 4 h, selon les informations d’Antoine Mariotti, ancien correspondant de France 24 en Israël.
Selon le site d’information américain Axios, le texte s’appuierait sur un projet américain incluant la mise en place d’un comité international pour en surveiller l’application.
D’après les informations recueillies par le site d’informations I24news auprès d’un haut responsable israélien, cette accélération des discussions serait notamment due à la volonté d’éviter « un vote au Conseil de sécurité de l’ONU« , mais aussi à la fatigue des troupes engagées depuis plus d’un an à Gaza et maintenant au Liban, et enfin à la volonté de « couper le lien entre Gaza et le Liban ».
Avant le cabinet de sécurité israélien, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, avait affirmé son opposition, sans préciser s’il quitterait le gouvernement si un cessez-le-feu venait à être signé.
« Un accord avec le Liban est une grave erreur. Une occasion historique manquée d’éradiquer le Hezbollah. Je comprends toutes les contraintes et raisons, et cela reste une grave erreur. Il faut écouter les commandants qui combattent sur le terrain, écouter les chefs des autorités », a expliqué le ministre sur X. « C’est précisément à l’heure où le Hezbollah est battu et aspire à un cessez-le-feu qu’il lui est interdit de s’arrêter. Comme je l’avais déjà prévenu à Gaza, je préviens maintenant également : Monsieur le Premier ministre, il n’est pas trop tard pour mettre un terme à cet accord ! Il faut continuer jusqu’à la victoire absolue ! »
Cessez-le-feu de deux mois
La proposition en discussion pour mettre fin aux combats entre Israël et le Hezbollah porte sur un cessez-le-feu initial de soixante jours. Pendant cette période, l’armée israélienne se retirerait du Liban et le Hezbollah mettrait fin à sa présence armée le long de la frontière israélienne en se repliant au nord du fleuve.
Le retrait des combattants s’accompagnerait de l’afflux de milliers de soldats de l’armée libanaise – largement restée à l’écart du conflit – pour patrouiller la zone frontalière avec la force de maintien de la paix de l’ONU sur place.
Selon le ministre des Affaires étrangères libanais Abdallah Bou Habib, l’armée serait prête à déployer au moins 5 000 soldats.
Un comité de surveillance international composé de cinq pays
Un comité international serait mis en place pour surveiller la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu et de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU. Adoptée en 2006 pour mettre fin à une guerre d’un mois entre Israël et le Hezbollah, elle n’a jamais été pleinement mise en œuvre : le Hezbollah n’a jamais mis fin à sa présence dans le sud du Liban, tandis que le Liban a régulièrement accusé Israël de violer son espace aérien et d’occuper de petites parcelles de son territoire.
La responsabilité de cette surveillance serait confiée à un comité composé de cinq pays, dont la France, présidé par les États-Unis, a expliqué à Reuters Elias Bou Saab, vice-président du Parlement libanais.
Le Liban et Israël semblaient être en désaccord sur les pays qui siégeraient au comité international supervisant la mise en œuvre de l’accord et de la résolution 1701. Signe d’un progrès dans les négociations, Israël semble avoir abandonné son opposition à la présence de la France, jugée trop proche du Liban et dont les récents désaccords ont braqué l’État hébreu.
De son côté, le Liban aurait refusé la participation de la Grande-Bretagne, jugée trop proche d’Israël. Reste à savoir si les responsables libanais ont abandonné de position après la concession israélienne sur la France.
Des questions en suspens
Malgré l’avancée apparente des discussions, de nombreux blocages demeurent. Selon des informations recueillies sous couvert d’anonymat par l’Associated Press, Israël demande plus de garanties pour s’assurer que les armes du Hezbollah soient retirées de la zone frontalière.
Le respect de la souveraineté du Liban
Préoccupés par la possibilité que le Hezbollah lance une attaque terroriste d’une envergure comparable à celle du 7 octobre 2023 par le Hamas, les responsables israéliens ont déclaré qu’ils n’accepteraient pas un accord de cessez-le-feu qui ne leur accorderait pas explicitement la liberté de frapper le Liban en cas de violation des termes par le Hezbollah.
« Toute maison reconstruite dans le sud du Liban servant de base terroriste sera détruite, tout réarmement ou préparation à une activité terroriste sera cible d’attaque, toute tentative de transfert d’armes sera contrecarrée, et toute menace contre nos forces ou nos citoyens sera immédiatement éliminée », a prévenu le ministre de la Défense Israël Katz en soulignant une « politique de tolérance zéro ».
Mais un tel accord violerait la souveraineté du Liban. Le chef du Hezbollah, Naim Kassem, a déclaré que le groupe militant n’accepterait pas un accord qui n’impliquerait pas une «fin complète de l’agression» et ne protégerait pas sa souveraineté.
La ligne bleue et les 13 points contestés
Dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu, Israël refuse toute négociation portant sur les 13 points contestés le long de la frontière libanaise, ont déclaré ses diplomates.
Le Liban estime que ses frontières ont été délimitées en 1923 par l’accord Paulet-Newcombe entre les Britanniques et les Français. Après le retrait israélien du Liban en 2000, les Nations unies ont tracé une ligne de démarcation entre les deux pays, connue sous le nom de « Ligne bleue ». Mais 13 points restent contestés, comme les villages occupés de Ghajar, Kfar Chouba et les fermes de Chebaa.
Crainte d’un embrasement régional
Un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, le plus puissant des proxys de l’Iran, devrait apaiser considérablement les tensions régionales et réduire les risques d’une guerre directe entre Israël et l’Iran. Dans le cas contraire, le conflit pourrait s’étendre à la Syrie et à l’Irak.
Israël a mené des frappes aériennes régulières contre des groupes liés à l’Iran en Syrie et a menacé de frapper en Irak, où des milices soutenues par Téhéran ont périodiquement lancé des attaques de drones contre l’État hébreu. Geir Pedersen, l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, a déclaré lors d’une visite à Damas dimanche que les cessez-le-feu à Gaza et au Liban étaient essentiels pour « éviter que la Syrie ne soit entraînée encore plus dans le conflit ».
Le Hezbollah affaibli mais pas vaincu
Israël a toujours affirmé que son objectif dans la guerre contre le Hezbollah était de permettre aux Israéliens déplacés de rentrer chez eux en toute sécurité. Or, si le mouvement chiite a largement été affaibli depuis deux mois, il continue de tirer sur Israël. Dimanche 24 novembre, le Hezbollah a tiré environ 250 roquettes et autres projectiles, blessant sept personnes dans l’un des plus violents barrages du groupe militant depuis des mois.
De violents affrontements se poursuivent également dans le sud du Liban alors que les forces israéliennes tentent de prendre le contrôle de villes stratégiques.
Comment la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza en serait affectée ?
La question reste entière. Le Hezbollah a longtemps insisté sur le fait qu’il n’accepterait pas un cessez-le-feu tant que la guerre à Gaza ne serait pas terminée. Cette condition semble avoir largement été abandonnée.
Une perspective qui inquiétait déjà certains Palestiniens en dépit de leur solidarité avec les Libanais. D’après un Gazaoui réfugié en Égypte interrogé sous couvert d’anonymat par Haaretz, « un cessez-le-feu au Liban affectera mentalement les habitants de Gaza. Voir les Libanais rentrer chez eux, nettoyer leurs rues – même si nous serions heureux pour eux – ce sera douloureux pour nous. La question de savoir pourquoi nous n’avons pas cela nous aussi se posera inévitablement. »
Au Liban, la population attend avec impatience la fin de la guerre. Un quart de la population a été déplacée, et certaines localités, en particulier dans le sud du Liban et dans les zones au sud de Beyrouth, la capitale, ont été détruites.
Avec France24