Conflit RDC – Rwanda : Le Vrai Crime et Péché (Tribune de Jo M. Sekimonyo)

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Chacun a une responsabilité morale cruciale envers la préservation et le respect de la vie humaine. En tant que citoyen, il est essentiel de contribuer activement à la sauvegarde de la sacralité de la vie humaine en veillant au bien-être et à la sécurité de ses concitoyens. Chaque gouvernement, en tant qu’entité, détient une responsabilité encore plus grande que celle d’un simple citoyen conscient de ses devoirs.

En RDC, cette dynamique semble avoir été altérée, puisque depuis la plus haute autorité, le chef de l’État, jusqu’au citoyen ordinaire, la priorité a été accordée à la terre et les ressources naturelles plutôt qu’à la vie humaine. Cette inversion de valeurs souligne une déconnexion inquiétante par rapport à l’importance fondamentale de la vie humaine, entraînant ainsi d’importants défis moraux au sein de la société congolaise.

La mise en lumière la plus frappante de cette contradiction se retrouve dans les slogans et les attitudes des Congolais face aux attaques du M23, soutenues et justifiées par Kagame. Un message puissant émane lorsque le président Tshisekedi déclare avec fermeté que la RDC ne cédera aucune partie de son territoire au Rwanda, une position largement soutenue en principe par tous les Congolais à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Cette affirmation revêt une importance particulière en soulignant que Kagame persiste dans l’utilisation de groupes armés rebelles Tutsi congolais pour assurer le flux de coltan et d’autres minéraux de la RDC vers le Rwanda. Par conséquent, il est interprété comme un crime commercial motivé par les objectifs de développement économique du Rwanda, justifié par des considérations tribales.

Toutefois, une analyse économique approfondie révèle que d’importantes portions de notre économie nationale, de nos industries et de nos terres sont actuellement sous le contrôle d’entités étrangères. Il est crucial de noter que ni les Chinois, les Suisses, ni les Américains n’ont eu recours à la force armée pour s’approprier de nos mines, et les Kényans ou Nigérians n’ont pas adopté cette approche pour prendre le contrôle du réseau bancaire congolais.

En réalité, l’exploitation des ressources congolaises requiert des transactions financières, parfois assorties de pots-de-vin, pour accéder et exploiter les précieuses richesses du pays, sans forcément avoir recours à la violence armée. La question pertinente qui se pose est : pourquoi Kagame n’opte-t-il pas pour une stratégie similaire ? Une explication plausible pourrait être sa situation économique précaire et son approche dépassée. Cette réalité souligne de manière impérative la nécessité de démêler le commerce des ressources naturelles de la violence armée, afin de qualifier correctement les crimes commis et d’établir des sanctions appropriées.

Crime et péché

L’histoire tisse souvent des trames dramatiques, des récits d’espionnage et de trahison, parfois empreints de romantisme. Pourtant, elle ne glorifie pas la voie des meurtriers, contrairement à ce qui se passe en RDC.

Dans un contexte plus large, le discours sur la conquête économique ou foncière sert de récit divergent, détournant l’attention des graves crimes commis par Kagame et les membres du M23 sur le sol congolais. Ces crimes vont bien au-delà de simples transgressions, incluant des actes de violence et, osons le dire, des atrocités de masse contre le peuple congolais.

D’autre part, le péché est que le peuple congolais et son gouvernement semblent implicitement cautionner l’horrible crime en excusant le meurtre de Congolais sans conséquence, pourvu que l’auteur ou les auteurs soient affiliés à un groupe armé ou prétendent agir en défense des droits d’une tribu. Cette attitude permissive contribue à perpétuer un climat d’impunité, où des actes de violence brutale restent impunis en raison de ces justifications fallacieuses. En conséquence, cela alimente le cycle de violences et compromet la quête de justice et de paix pour le peuple congolais.

Quant à la perplexité entourant le ralliement de membres éminents des forces armées au M23, immortalisant leur choix à travers des vidéos, suivis maintenant par des politiciens, il est plausible de supposer qu’ils sont motivés par des avantages résultant de leur implication passée dans ces mouvements ou des bénéfices découlant de leur adhésion. Dans le passé, après des négociations, les meurtriers ont été parés de galons sur leurs épaules ou ont obtenu des responsabilités de premier plan dans les services secrets, tandis que les technocrates ont été promus à des postes éminents au sein du gouvernement. Ainsi, il est possible de conclure que, plus que tout, tout comme par le passé, les monstres et les âmes ordinaires sont tous animés par un sentiment d’impunité en rejoignant cette aventure morbide.

La cure

Comment les Congolais peuvent-ils oser nourrir l’espoir de construire une puissance économique et une nation moderne alors que des générations entières sont marquées par le traumatisme ?

Incontestablement, Mobutu incarne la quintessence d’un dictateur, engendrant ainsi un traumatisme national résultant de l’adoration perpétuelle envers une seule personne et du risque de perdre sa vie en s’opposant à sa volonté, aussi ignoble ou stupide soit-elle. Toutefois, les actions de Laurent Kabila, avec le soutien de déplorables alliances, ont conduit à la tolérance envers les groupes congolais qui attaquent d’autres groupes ou l’ensemble des Congolais, marquant ainsi l’avènement de l’ère de la dévaluation totale de la vie humaine, laquelle constitue le traumatisme le plus inhumain.

Quels seraient les premiers pas à entreprendre désormais dans la bonne direction ?

Tout d’abord, il est impossible de promouvoir le bien commun sans reconnaître et défendre le droit à la vie. Nommons ce qui se passe en RDC pour ce qu’il est : un génocide.

Deuxièmement, établir une nouvelle norme : en aucun cas, les autorités congolaises ne devraient négocier avec des groupes criminels. Des sanctions doivent être émises sur les membres de ces organisations et sur le Rwanda dans le cas du M23, ainsi que sur tous les autres groupes armés et leurs sponsors. Autrement, il serait nécessaire de libérer tous les individus impliqués dans des activités criminelles, les kulunas, de les apaiser en leur présentant les mêmes propositions faites à ces groupes.

Troisièmement, une société manque de bases solides lorsqu’elle affirme des valeurs telles que la dignité de la personne, la justice et la paix, tout en permettant ou en tolérant diverses formes de dévalorisation et de violation de la vie humaine. Il est impératif que le gouvernement fasse respecter le droit à la vie, le fondement des biens précieux de la société, tels que la démocratie et la paix. Actuellement, la constitution ne les oblige pas à le faire. Des lois cohérentes, directes et adéquates visant à protéger la vie humaine potentielle se font attendre depuis trop longtemps. C’est pourquoi, dans la constitution révisée que nous proposons, nous énonçons :
ARTICLE 4.
L’article 11 est modifié comme suit :
Chaque vie est sacrée.
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.
Toute fois la jouissance des droits politiques est reconnue aux seuls congolais sauf exceptions établies par la loi.
Les congolais coexistent en tant qu’individus et non en tant que groupe.
Nul ne peut exercer le droit de tuer autrui, sauf dans les cas de légitime défense reconnus par la loi.
La légitime défense, en stricte conformité avec les dispositions légales, ne peut, en aucune circonstance, être invoquée comme justification ou excuse pour l’homicide, que celui-ci soit commis par un individu ou un groupe agissant au nom d’un individu ou d’un groupe.
L’État est tenu de présenter devant un tribunal congolais toute personne impliquée dans le meurtre d’un citoyen congolais, sans tenir compte du genre, de la religion, de la situation socio-économique, de la résidence, de l’appartenance culturelle ou de la nationalité de l’auteur, même si le crime a été commis au-delà des frontières nationales.

Comment réparer le vase brisé ?

Les ravages de la guerre, tels que ceux en RDC, engendrent une perte collective d’innocence morale et sexuelle, impactant l’ensemble de la société. La volonté des auteurs de crimes de commettre des atrocités démontre la capacité de la guerre à dépouiller l’humanité de sa vertu. Parallèlement, la destruction et le déplacement de citoyens désespérés priveraient la nation de son humanité, entravant le développement économique et social.

Plus préoccupant encore, la terreur de la guerre affecte profondément l’avenir d’une nation, surtout pour un enfant. Les études soulignent que les enfants témoins de guerres développent une anxiété accrue et d’autres effets qui les handicapent dans leur capacité à rivaliser avec leurs contemporains d’autres régions, entravant ainsi leurs chances de briser le cycle de la pauvreté. Malgré cela, l’adaptabilité, la créativité et l’ingéniosité des enfants offrent un rayon d’espoir.

Néanmoins, une sortie collective de cette tourmente nécessitera expertise, programmes, et surtout des ressources financières, un sujet que j’ai déjà exploré en détail dans mes écrits antérieur.

Jo M. Sekimonyo
Écrivain, théoricien, défenseur des droits de l’homme et économiste politique

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