C’est la confusion la plus totale. Le « roi » dollar connaît une chute libre sur le marché d’échange. Chaque cambiste – catégorie qui brasse la plus importante masse monétaire – fixe son taux en ignorant complètement le taux directeur de la Banque Centrale du Congo (BCC). C’est l’anarchie.
10$ contre 20.000 FC pour certains, 10$ contre 18.000 FC pour d’autres. Alors dans les supermarchés de la ville de Kinshasa, 10$ s’échangent contre 25.000 FC. Quant à la BCC, elle fixe son taux directeur à 17,5℅.
Cependant, les prix sur le marché ne semblent pas suivre ces fluctuations. Presque tout est statique hormis quelques rares produits ayant connu une légère baisse malgré cette forte appréciation du franc congolais.
Pour certains, il s’agit d’une courte joie, d’un feu de paille. D’autant plus que le tout nouveau Gouverneur de la BCC a pris la mesure d’injecter sur le marché la faramineuse somme de 50 millions de dollars américains. D’où, cette dépréciation du dollar au marché parallèle au profit de la monnaie nationale. Sous le régime Mobutu, la Banque Centrale recourrait à la fameuse planche à billets.
Les premiers à faire les frais d’une telle économie dollarisée c’est bien évidemment les consommateurs kinois. Ils sont en colère parce que leur pouvoir d’achat est en train de s’effondre d’une manière très alarmante. A titre d’illustration, le prix du carburant à la pompe a un tout petit peu baissé (-300 FC) mais la tarification dans le secteur du transport en commun reste inchangée. Les coûts des courses par bus, motos, taxis restent les mêmes. C’est donc la population qui en souffrent et continuera à souffrir.
Les sacs de semoule, de sucre, de riz conservent pratiquement les mêmes prix qu’au moment où 10$ s’échangeaient à 29.000 FC au marché parallèle. Un sac de semoule « Master Plus » revient actuellement à 61.000 FC, soit 30$ au taux des cambistes de la capitale. Une hausse de près de 5$ qui préjudicie les consommateurs. La boîte de lait « Belle Hollandaise » (2.500 grammes) coûtent toujours 93.000 FC dans certains supermarchés : soit 46$. Une hausse de près de 15$ pour ce produit laitier. Par contre, il faut reconnaître que les prix du pain, du sac de ciment et quelques autres produits ont légèrement baissé.
Quant aux vivres frais, c’est la débandade des consommateurs dans les chambres froides de Kinshasa. Un carton de poulet s’écoule pratiquement à 45$ au marché de Kintambo. Alors que son prix n’excédait pas 26 USD il y a quelques semaines. La tarification des mégas pour l’accès, des crédits auprès des opérateurs de téléphonie mobile n’a pas changé. Il en est de même pour les abonnements Canal + et Easy TV. Aussi pour les billets d’avion. A qui finalement profite cette prétendue embellie du franc congolais ? Aux opérateurs économiques aussi bien nationaux qu’étrangers. Dans cette confusion monétaire, ils font des bonnes affaires. En revanche, c’est le pouvoir d’achat qui s’évapore.
Certes, le ministère de l’Economie impose à ces opérateurs économiques, commerçants, d’afficher leurs prix en franc congolais dans les différents rayons. Mais pour quelle finalité ? Ils réalisent des gains mirobolants au grand dam de la population.
Les travailleurs rémunérés en monnaie étrangère, en dollar américain, grincent également les dents et peinent à nouer les deux bouts du mois. C’est le cas, notamment au Parlement, où les élus et les membres de cabinets sont payés en dollars. Ils ont considérablement perdu le pouvoir d’achat même si le franc congolais s’apprécie, depuis un certain temps, au marché parallèle. Les bailleurs aussi grincent les dents. C’est le désarroi.
Pour celles et ceux qui connaissent les abc de l’économie, la valeur d’une monnaie est effectivement tributaire de la production. Il n’y a pas un autre miracle, surtout dans un pays à économie extravertie. L’on dénote les liens entre production et valeur de la monnaie dans ces facteurs : la fiscalité et activité économique ; confiance ; offre et demande ; théorie quantitative de la monnaie.
Que produit la République démocratique du Congo ? C’est aux tenants du pouvoir de donner la réponse à cette question fondamentale. Le ministre de l’Economie doit déployer ses inspecteurs partout pour que cette embellie de la monnaie nationale ne se confonde pas à un feu de paille. Autrement, c’est la jungle, la loi du plus fort.
James Mpunga Yende


