La question des avortements clandestins constitue un défi majeur en République Démocratique du Congo (RDC). À Lubumbashi, centre économique du pays, les hôpitaux continuent d’enregistrer des cas alarmants de complications et de décès liés à cette pratique dangereuse.
Une étude récente réalisée par des chercheurs du Département de gynécologie-obstétrique de la Clinique universitaire de Lubumbashi révèle une préoccupation croissante concernant les avortements non sécurisés. Sur une période de trois ans, de 2019 à 2021, le taux d’avortements non sécurisés a été évalué à 9,41 % des grossesses au premier trimestre, soulignant l’urgence d’améliorer l’accès à des services d’avortement sécurisé.
L’âge moyen des patientes ayant subi des complications liées à des avortements non sécurisés est de 27,56 ans, avec des extrêmes allant de 15 à 38 ans. Les résultats montrent que des facteurs tels que le célibat, un âge inférieur à 25 ans et le statut d’étudiante sont significativement associés à ces complications. Environ 87 % des patientes et 57 % du personnel médical interrogé ignorent les récentes modifications du cadre juridique en matière d’avortement, qui permettent la pratique dans certaines conditions, conformément à l’article 14 du Protocole de Maputo. Ce dernier reconnaît explicitement l’avortement comme légal en cas de viol, d’inceste, de malformation fœtale grave, ou de danger pour la vie et la santé mentale de la femme.
Des conséquences alarmantes
Les complications observées dans cette étude sont préoccupantes. La rétention placentaire a été constatée chez 31,25 % des cas, tandis que des cas d’endométrite ont été rapportés dans 12,5 % des situations. Tragiquement, la mortalité maternelle liée à ces avortements non sécurisés représente 22 % des décès maternels signalés durant la même période. Ces chiffres alarmants témoignent d’un risque élevé de décès maternels, qui, selon d’autres études africaines, varie entre 12 et 30 %.
Un appel à la sensibilisation
Les auteurs de l’étude plaident pour une sensibilisation accrue des jeunes adultes et des professionnels de santé sur les méthodes sécurisées d’avortement. Ils insistent sur la nécessité d’une meilleure compréhension des droits liés à l’avortement, surtout à la lumière des récents changements juridiques. La faible connaissance de ces lois contribue à la persistance des pratiques non sécurisées.
Cette étude met en exergue l’urgence d’améliorer l’accès à des avortements sécurisés à Lubumbashi et la nécessité d’éduquer la population sur les méthodes de contraception et les risques associés aux interruptions volontaires de grossesse non sécurisées. Les recommandations incluent la vulgarisation du Protocole de Maputo et la formation du personnel médical sur les soins centrés sur la femme, comme le préconise l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est essentiel de noter que la situation n’a que peu évolué depuis le ralentissement des campagnes de sensibilisation avec l’avènement de la COVID-19.
Le chemin reste long pour garantir la sécurité et la santé des femmes à Lubumbashi, mais une action collective et informée pourrait transformer cette réalité.
Jules Ntambwe


